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Mode et fiction, d'après Quentin Bell.
Ceci m'évoque une chose remarquée et commentée par Quentin Bell dans Mode et société, à savoir que le traitement des costumes au théâtre et au cinéma s'inscrit toujours dans une actualisation des formes au détriment du réalisme historique. https://twitter.com/euuworst/status/1354466006094254085
Ceci m'évoque une chose remarquée et commentée par Quentin Bell dans Mode et société, à savoir que le traitement des costumes au théâtre et au cinéma s'inscrit toujours dans une actualisation des formes au détriment du réalisme historique. https://twitter.com/euuworst/status/1354466006094254085
Comme on peut le voir sur l'image, les vêtements portés par la Lady Diana incarnée par Kirsten Stewart ne sont pas une reproduction exacte des vêtements portés par l'authentique Lady Diana;
la veste est plus texturée, les crans sont plus arrondis, l'épaule est différente, la voilette est plus ample etc. En somme La Lady Di de 2021 est mise plus aux goûts de 2021 pour séduire des spectateurs de 2021. Ce n'est pas quelque chose de nouveau.
Les épaules carrées de notre image originale sont typiques des coupes qu'on trouvait fin des années 80 et 90 et qui ont disparues de la mise portée par Stewart au profit d'épaules plus tombantes et moins structurées.
Quentin Bell remarque ainsi que le costume que porte Cléopâtre ainsi que sa coiffure dans le "Antoine et Cléopâtre" qu'on jouait au cours des années 1840 à Sadler's Well permet bien d'identifier une mise en scène des années 1840.
Pour rester dans le même thème antiquisant, la Cléopâtre incarnée par Elizabeth Taylor en 1963 - quand bien même les costumes se veulent refléter l'Egypte antique - est mise de façon à séduire un œil de son temps:
On peut d'ailleurs en dire autant de la Cléopâtre jouée par Monica Bellucci dans Astérix et Obelix:
Le costume d'époque au cinéma n'est jamais qu'un simulacre de réalisme qui flatte le regard de ses contemporains car, comme le dit Quentin Bell:
"Mode et beauté deviennent souvent synonymes, et une représentation qui se conforme aux canons de la mode dominante apparaîtra comme la plus séduisante".
Cette propension à représenter des scènes historiques avec des costumes contemporains, on la trouvait déjà dans la peinture, ce tableau de Hans Holbein l'Ancien nous donne à voir le martyr de Saint-Sébastien:
Cependant les costumes ne sont absolument pas conformes à l'époque représentée (IIIe siècle), ils sont typiques du XVIe siècle, durant lequel le tableau a été peint. On remarque que l'architecture est également actualisée.
Quentin Bell remarque ce même souci d'actualisation dans la littérature avec le cas de Vanity Fair, roman de Thackeray à propos duquel il écrit:
"Il ne me semble pas douteux que l'imaginaire littéraire soit dans une large mesure gouverné par la mode. En voici, à titre de preuve, quelques exemples.
Vanity Fair de W. M. Thackeray parut en 1847, année où l'on voyait beaucoup de pantalons, de favoris, de capotes, de chignons, de boucles à l'anglaise, d'emmanchures basses et de jupes volumineuses.
On les retrouve dans les illustrations de Thackeray lui-même pour son roman, et on pense donc tout naturellement, avant même de le lire, qu'il s'agit d'un roman de "la vie moderne", qui se déroule en 1947.
Il n'en est rien. Vanity Fair est un roman historique qui se donne comme tel, puisque la bataille de Waterloo a lieu en plein milieu de l'action".
En somme, toutes nos représentations mentales historiques liées à l'esthétique sont conditionnées par le cinéma, la littérature, les séries etc, elles-mêmes conditionnées par la mode actuelle.
On peut toutefois constater, il est vrai, une influence réciproque de la fiction et de la mode, ce sera peut-être l'objet d'un prochain fil.
