#ParlonsStratégie
#CamairCo #Pourquoiçacoince
"CamairCo est une compagnie où tout le monde vole sauf les avions"
Cette formule lapidaire en forme d’épitaphe de W. Ekanga est un résumé express et efficace la situation de l’étoile du Cameroun, sa prédécesseure et ses homologues
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Cependant la formule donne l’impression de mettre le focus plus sur la faillite des hommes (tout le monde vole) que sur les dysfonctionnements de fond de l’organisation et de son écosystème.
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C’est ce diagnostic erroné qui conduit l’exécutif camerounais à remanier avec la régularité d’un métronome par vagues le top management de la boîte et y injecter milliards après milliards
Il est erroné, car le problème se situe au niveau de la stratégie systémique
3/
Le problème de CamairCo, ce n’est pas le problème de CamairCo, c’est le problème de tout le système de transport du Cameroun, c’est le problème de la stratégie du transport au Cameroun
C’est la fameuse situation de la charrue avant les bœufs
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Pour un pays comme le Cameroun entreprendre d’entretenir une compagnie aérienne doit s’insérer dans un plan directeur du secteur des transports
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Pour autant qu’elle soit une compagnie commerciale, et donc avec pour objectif le profit, CamairCo a une fonction d’utilité publique
Celle-ci est de contribuer à la fluidité du transport des biens et des personnes en république du Cameroun
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Et bien évidemment au delà des frontières nationales, une fois que la maîtrise du marché local est assurée
Mais même là l’extension du réseau à l’international doit s’aligner sur les flux économiques essentiels du pays
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Ouvrir une ligne commerciale vers Paris c’est bien mais si au même moment des passagers potentiels et du fret pour Maroua, N’Djamena sont en rade, ça devient moins intéressant tout d’un coup
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Revenons au système global de transport
4 possibilités (Route, Rail, Air, et voie fluviale) pour assurer la mobilité des personnes et des biens (fret)
Quelle est la stratégie adoptée par le gouvernement pour résoudre cette équation ?
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Aucun pays ne peut se passer d’un solide réseau routier parce qu’il assure l’autonomie de mouvement. On va beau gloser sur l’état des nationales 1 et 3, mais chacun est globalement libre de s’y engager avec son véhicule quand bon lui semble.
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Les agences ne manquent pas pour ceux qui n’ont pas de véhicules et les départs sont presque sur une base H24
Mais dès qu’il s’agit d’aller à Bertoua, Dimako, ou même Eseka les possibilités s’évaporent directement
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Au moins Eseka a le rail me direz-vous
Oui mais le rail a un pêché originel au Cameroun, c’était une ligne de fret qui traversait le pays bassa et les locaux en profitait ou étaient charriés comme une marchandise ou une autre pour aller aux travaux forcés
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On a bien essayé de mettre en place une ligne de transport des hommes mais le tracé et l’organisation de cela restaient fondamentalement ceux du fret
Résultat faible qualité de service et abus en tous genre y compris des usagers
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La crise économique a scellé le sort de l’activité, et une fois la longue privatisation achevée, qu’a fait l’opérateur privé repreneur de l’activité?
Focus sur le fret et service minimum sur les personnes
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Disons ici que le tracé et l’infrastructure y sont pour beaucoup
On peut faire du fret sur une ligne orientée personne, mais l’inverse est plus compliqué
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Si on veut faire une vraie ligne de rail pour les personnes, de gros investissements sont nécessaires
Les cahots que ressentaient les usagers de l’Intercity avant son accident de sinistre mémoire n’étaient pas dus qu’à la qualité des wagons
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Pour la voie fluviale, un service public de ce type au Cameroun a-t-il jamais existé ? Et si oui, a-t-on été au delà de l’éphémère ?
Reste les prestataires individuels
Oui nous parlons bien des artisans-piroguiers à moteur ou force humaine
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Eux qui opèrent au péril de leur vie et de celle de leurs clients en l’absence de tout protocole et équipement de sécurité et qui pour certains font des incantations au moment de l’embarquement
Il devraient arrêter si c’est pour le folklore ou être plus discrets
😅
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En bref route et rail = gros besoin en investissements pour un plan de développement de très longue haleine
Voie fluviale = Error 404 (Allez développer un circuit touristique dans les mangroves littorales avec ça👎🏿)
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Et c’est là qu’arrive l’avion avec ses possibilités magiques
Des sauts de puces qui contournent les obstacles du relief et des gains de temps exceptionnels
Mais voilà la CAMAIR et sa suivante n’ont pas été pensées ainsi
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Elles ont été pensé comme un outil de représentation politique qui devait clouer le bec à ces partenaires rétifs dAir Afrique
Donc au lieu d’un focus sur le Cameroun et ses flux économiques, on s’est retrouvé avec un focus sur l’Afrique et ses rivalités politiques stériles
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Donc empilation de mauvaises décisions : Achats de gros porteurs, ouverture de lignes faible potentiel et grosse concurrence, entretien dispendieux d’un personne aussi extensif qu’improductif, etc.
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Faisons une pause pour dire que les pesanteurs du politique sur le fonctionnement (vols présidentiels, occupation régalienne des places, dettes de l’Etat, etc.) ont un rôle non négligeable dans l’asphyxie des itérations de la compagnie
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Mais ici c’est la faillite stratégique de ce même acteur institutionnel régalien qui fait l’objet de notre analyse. Nous éviterons donc de la parasiter avec les tares du niveau opérationnel
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Les CAMAIRs, d’hier comme d’aujourd’hui, sont donc tournées vers l’extérieur et pas les besoins du Cameroun profond, ELLES NE S’INSERENT AUCUNEMENT DANS UN SCHÉMA DIRECTEUR DU TRANSPORT NATIONAL, quoiqu’en dise la communication institutionnelle
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Même la ligne Douala - Yaoundé n’est qu’une vitrine à cet effet et elle est aisément sacrifiée en cas de soucis dans le planning des vols.
"Paris à tout prix" n’était pas que le titre d’un film
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On l’a vu le secteur du transport manque de routes et de rail
Qui plus est quand on considère l’important maillage d’agglomérations et leur rôle stratégique dans le commerce régional
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Kousseri est plus qu’une ville frontière.
Kousseri est quasiment la capitale économique de la zone des trois frontières 🇨🇲🇹🇩🇳🇬 avec un potentiel sous exploité
Pour le réaliser il faut desserrer l’enclavement de fait de cette ville
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Permettre au fret et au moins au transport d’affaires de se mouvoir d’y aller et d’en venir rapidement
Hé bien Seule la route dessert cette ville. Passons sous silence son état. Elle y est quand même
Mais Kousseri n’a pas l’avion, ni le rail.
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Comme Kye-Ossi, là aussi trois frontières (🇨🇲🇬🇦Guinée Équatoriale) et Ntam (frontière Congo🇨🇬)
En attendant la route 1 système de transport aérien à taille humaine pouvait/aurait dû fournir l’appel d’air nécessaire pr aider ces villes stratégiques à assumer tt leur potentiel
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Avec CAMAIR (Co) en situation de monopole ou en leader d’un secteur privé bien réglementé
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Mais pour ça, il aurait fallu renoncer à tout ce qui fait les CAMAIRs
Les gros porteurs, la volonté forcenée de desservir l’Europe ("Ah Paris !!!"), l’étatisation de la gouvernance, l’omniscience des camerounais qui font fi des conseils des partenaires techniques, etc.
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Pourquoi ça coince avec CAMAIRCo ?
Parce que cette compagnie n’est pas insérée dans une quelconque stratégie de transport nationale, pas plus qu’elle ne dispose d’une stratégie viable de conquête sur le marché international
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Marché qui voit des majors africains suer sang et eau (South African Airways) d’autres encore plus gros s’allier pour résister (Air France -KLM)
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La bonne stratégie, car il y’en a bien une même si elle aurait ignoré les problématiques internes du secteur de transport, aurait justement été de nouer une alliance du type Ethiopian Airlines -Asky
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Donner les clés du jumbo à 1 partenaire confirmé & le laisser piloter la politique commune d’expansion
Pourquoi pas faire 1 combo des deux en développant simultanément 1 écosystème local par le jeu de la réglementation, des infrastructures et de l’incitation fiscale
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La bonne nouvelle c’est qu’il n’est pas tard
Nos voisins ayant allègrement repris nos erreurs (CEIBA, ECAir), ils n’ont pas occupé le vide que nous évertuons opiniâtrément à entretenir, la situation peut être redressée
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Pour cela, il faut arrêter l’acharnement thérapeutique autour de CAMAIRCo, prononcer le décès, lui trouver une place de choix dans le cimetière des entreprises d’état au côté de la BCD et autres SODIACAM et lui offrir des obsèques dignes de son rang
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Sans oublier une épitaphe dans le style bien lapidaire de W. Ekanga
Ci-gît CAMAIRCo, la compagnie aérienne qui n’a volé que dans nos égos 😈
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Une fois CAMAIRCo sortie définitivement du paysage, il faudra réformer non pas une compagnie aérienne mais tout le secteur du transport et enfin lui rendre sa fonction d’utilité publique
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Permettre aux camerounais et visiteurs de se déplacer avec leurs biens, ici et éventuellement ailleurs rapidement et en toute sécurité
Ce n’est pas le rôle de l’Etat de fournir cette prestation, mais c’est son devoir de s’assurer qu’elle est fournie par des opérateurs sérieux
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Après tout l’État, côté routes s’est quasiment désengagé du transport urbain et n’a jamais exercé dans l’interurbain
Côté rail également le retrait a été acté
Pourquoi seul, le transport aérien devrait faire exception ?

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