Dans ce fil de tweets, je vais analyser l'article suivant d' @EmilieMassemin pour @Reporterre, qui est à la fois partial et qui contient de nombreuses inexactitudes.
[1/X] https://reporterre.net/Les-contre-verites-d-Emmanuel-Macron-sur-le-nucleaire
[1/X] https://reporterre.net/Les-contre-verites-d-Emmanuel-Macron-sur-le-nucleaire
L'article commence par rappeler que l'énergie nucléaire n'est pas "intégralement décarboné". C'est vrai mais ça l'est aussi des énergies renouvelables (éolien, solaire, hydroélectricité, biogaz, etc.)
[2/X]
[2/X]
Sur son cycle de vie, l'énergie nucléaire est l'une des moins carbonées dont on dispose et c'est sans compter les dispositifs de gestion de l'intermittence (pour éolien et PV), qu'il faudrait prendre en compte pour comparer à service équivalent.
[3/X]
[3/X]
Vu que l'article de @Reporterre cite le GIEC, je reproduis ci-dessous le graphique tel qu'il est dans le 5e rapport d'évaluation, 3e groupe de travail, chapitre 7 sur l'énergie.
Source : https://archive.ipcc.ch/report/ar5/wg3/
[4/X]
Source : https://archive.ipcc.ch/report/ar5/wg3/
[4/X]
L'article continue en donnant des valeurs brutes d'émission pour l'usine de la Hague en insinuant que le nucléaire aurait en réalité une intensité carbone plus élevée que ce qui ressort des analyses de cycle de vie.
[5/X]
[5/X]
Tout d'abord, il y a eu de nombreuses analyses de l'empreinte carbone du nucléaire sur le cycle de vie, réalisées par plein d'organismes différents de par le monde, qui donnent plus ou moins les mêmes valeurs.
En voici une pour la France.
[6/X] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0360544214002035
En voici une pour la France.
[6/X] https://www.sciencedirect.com/science/article/pii/S0360544214002035
Ensuite, on ne peut pas remettre en question une intensité carbone sur le cycle de vie en donnant les émissions brutes d'une usine. Celles-ci doivent être ramenées à la production .
Pour pouvoir comparer des sources d'énergie, il faut des émissions par kWh.
[7/X]
Pour pouvoir comparer des sources d'énergie, il faut des émissions par kWh.
[7/X]
L'article insinue ensuite que l'énergie nucléaire est intermittente, du fait des arrêts de réacteur. C'est foncièrement malhonnête. La production nucléaire française ne tombe jamais à zéro, loin s'en faut.
[8/X] https://twitter.com/GoldbergNic/status/1338523024572747777
[8/X] https://twitter.com/GoldbergNic/status/1338523024572747777
A contrario, les panneaux solaires ont une production rigoureusement nulle la nuit et l'éolien produit 10% du temps à moins de 10% de la puissance installée. Et le foisonnement à l'échelle européenne est très limité.
[9/X]
Graphique : https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/energies-th4/conversion-et-transport-d-energie-42206210/electricite-intermittence-et-foisonnement-des-energies-renouvelables-be8586/
[9/X]
Graphique : https://www.techniques-ingenieur.fr/base-documentaire/energies-th4/conversion-et-transport-d-energie-42206210/electricite-intermittence-et-foisonnement-des-energies-renouvelables-be8586/
Que l'on doive arrêter les réacteurs de temps en temps pour les entretenir et les recharger est normal. Et ces arrêts sont programmés pour ne pas tous arriver en même temps et sont concentrés en été quand la demande électrique est moindre.
[10/X]
[10/X]
L'article dit ensuite que les réacteurs nucléaires sont trop longs à construire. Ca dépend des cas. Il y a eu en effet des échecs industriels (Olkiluoto par Areva, Flamanville par EDF, Vogtle par Westinghouse) mais aussi plein de réussites.
[11/X]
[11/X]
Par exemple, il y a quelques jours, le 1er réacteur des Emirats Arabes Unis, construit par le Coréen Kepco, a atteint 100% de puissance. Il s'agit d'un réacteur de 3e génération qui a été construit en 6 ans.
[12/X] https://twitter.com/maxcordiez/status/1336583721777061888
[12/X] https://twitter.com/maxcordiez/status/1336583721777061888
Le problème émerge surtout avec les entreprises qui n'ont pas construit pendant longtemps. Être capable de gérer des projets d'une telle dimension impose d'en faire régulièrement.
[13/X]
[13/X]
Dans la même partie, @MycleSchneider compare le projet éolien en mer Hornsea 1 au nucléaire.
Poussons la comparaison, le prix garanti pour l'électricité qu'il produit était de 140 £/MWh.
Les EPR d'Hinkley Point sont à 92,5£/MWh...
[14/X]
Poussons la comparaison, le prix garanti pour l'électricité qu'il produit était de 140 £/MWh.
Les EPR d'Hinkley Point sont à 92,5£/MWh...
[14/X]
Depuis, le prix de l'éolien en mer a chuté au Royaume-Uni (il s'approche des 50£/MWh) et celui du nucléaire devrait suivre la même tendance (les négociations sont en cours mais Sizewell devrait être entre 60 et 70£/MWh).
[15/X] https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/le-financement-des-futures-centrales-nucleaires-britanniques
[15/X] https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/le-financement-des-futures-centrales-nucleaires-britanniques
C'est certes un peu plus élevé que l'éolien en mer mais :
- le service n'est pas le même (un EPR produit à la demande) ;
- les besoins d'énergie bas carbone sont tels qu'il faudra les deux.
[16/X]
- le service n'est pas le même (un EPR produit à la demande) ;
- les besoins d'énergie bas carbone sont tels qu'il faudra les deux.
[16/X]
Sur la référence au commentaires négatifs que ferait le GIEC sur le nucléaire, il y a le verbe "can" dans le rapport. Oui le nucléaire _peut_ induire des risques de prolifération, sur l'environnement ou la santé. C'est une possibilité, pas une fatalité.
[17/X]
[17/X]
Et de fait des réglementations strictes sont mises en place dans la plupart des pays pour éviter ça. Et il y a notamment des agences des Nations Unies en charge d'y veiller : l' @iaeaorg pour la sûreté et la lutte contre la prolifération
https://www.iaea.org/
[18/X]
https://www.iaea.org/
[18/X]
et l'UNSCEAR (Comité scientifique des Nations unies pour l'étude des effets des rayonnements ionisants) qui est un comité scientifique ayant le même statut que le GIEC mais compétent sur l'effet des radiations.
https://www.unscear.org/
[19/X]
https://www.unscear.org/
[19/X]
Sur la position de la Commission européenne, elle est effectivement partagée (des textes favorables, d'autres défavorables, et des textes à peu près neutres...).
[20/X]
[20/X]
La Commission européenne est aussi un organisme politique, qui a des enjeux politiques et comme pour le gouvernement d'un pays, ça pèse sur les décisions.
[21/X]
[21/X]
Sur le sujet de la taxonomie, il est faux de dire que « la question des déchets radioactifs bloque car elle ne permet pas au nucléaire de répondre au principe d’innocuité inscrit dans cette classification. »
[22/X]
[22/X]
Le groupe d'experts techniques (TEG) mandaté par la Commission européenne s'est déclaré incompétent sur le sujet et a appelé la Commission à mettre en place un groupe d'experts compétents pour trancher la question.
[23/X]
[23/X]
« the TEG recommends that more extensive technical work is undertaken on the DNSH aspects of nuclear energy in future and by a group with in-depth technical expertise on nuclear life cycle technologies and the existing and potential environmental impacts across all objectives. »
Source (p 235) : https://ec.europa.eu/info/sites/info/files/business_economy_euro/banking_and_finance/documents/190618-sustainable-finance-teg-report-taxonomy_en.pdf
Il y a une différence entre se déclarer incompétent pour trancher sur un sujet en appelant à ce que ce sujet soit traité par ailleurs (ce qu'a fait le TEG) et conclure sur le sujet après expertise (ce que n'a pas fait le TEG).
[25/X]
Il y a une différence entre se déclarer incompétent pour trancher sur un sujet en appelant à ce que ce sujet soit traité par ailleurs (ce qu'a fait le TEG) et conclure sur le sujet après expertise (ce que n'a pas fait le TEG).
[25/X]
De fait, le sujet de l'empreinte environnementale du nucléaire (et notamment des déchets) est actuellement en cours d'instruction par le Centre commun de recherche de la Commission européenne.
[26/39]
[26/39]
Les conclusions seront ensuite revues par le groupe d'experts de l'article 31 du Traité Euratom et par un groupe d'experts sur l'environnement.
[27/39]
[27/39]
Sur la question du nucléaire et du charbon en Allemagne, il est par contre vrai que la production d'électricité au charbon a diminué ces dernières années, grâce au développement des EnR et à l'inversion de compétitivité charbon/gaz.
[28/39] https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/decarbonation-du-systeme-electrique-europeen-des-progres-mais-rien-nest-acquis
[28/39] https://www.connaissancedesenergies.org/tribune-actualite-energies/decarbonation-du-systeme-electrique-europeen-des-progres-mais-rien-nest-acquis
L'Allemagne est cependant encore loin d'être sortie du charbon (ce qui devrait pourtant être la priorité) et restera dépendante pendant longtemps du gaz fossile.
Voir l'analyse que j'avais faite pour Le Figaro du plan
de sortie du charbon.
[29/39] https://www.lefigaro.fr/vox/monde/2019/01/28/31002-20190128ARTFIG00178-le-plan-de-sortie-du-charbon-en-allemagne-est-il-realiste.php
Voir l'analyse que j'avais faite pour Le Figaro du plan

[29/39] https://www.lefigaro.fr/vox/monde/2019/01/28/31002-20190128ARTFIG00178-le-plan-de-sortie-du-charbon-en-allemagne-est-il-realiste.php
Les deux prochaines années risquent d'ailleurs d'être particulièrement compliquées, car l'Allemagne doit encore fermer 8,5 GW de capacités nucléaires qui produisent en base d'ici 2022...
[30/39]
[30/39]
Concernant la stagnation du nucléaire au niveau mondial, je ne vois pas en quoi c'est un argument contre le nucléaire. Il stagne car certains pays en sortent pour raisons politiques (
), ou que le gaz très peu cher lui fait de la concurrence (
).
[31/39]


[31/39]
En tout cas, aujourd'hui ça reste la 2e source d'énergie bas carbone au monde et la 1ère en Europe.
[32/39]
[32/39]
Concernant la vulnérabilité du nucléaire au changement climatique, c'est un vrai sujet pour certaines installations existantes (pour les nouveaux réacteurs, c'est pris en compte, a minima dans les pays occidentaux, je ne saurais pas me prononcer sur tous les pays).
[33/39]
[33/39]
Cela dit, sur le sujet mentionné qui concerne l'insuffisance de débit de certains cours d'eau en été, EDF doit parfois réduire la puissance voire arrêter des réacteurs pour préserver la biodiversité en aval de la centrale. Ce n'est pas pour des questions de sûreté.
[34/39]
[34/39]
Actuellement, il est plus économique d'arrêter ces réacteurs quelques jours ou semaines, mais si l'équation venait à radicalement changer d'ici à la fin de vie de ces réacteurs, des solutions pourraient être envisagées, comme ajouter des aéroréfrigérants + performants.
[35/39]
[35/39]
Par exemple, la plus grande centrales nucléaire des Etats-Unis (Palo Verde) est dans le désert de l'Arizona. Elle n'est proche ni de la mer ni d'un cours d'eau et est refroidie par les eaux usées de la ville de Phoenix et 3 aéroréfrigérants mécaniques par réacteur.
[36/39]
[36/39]
En conclusion, cet article fortement à charge relève plus du tract militant que de l'exercice journalistique.
Les personnes citées (sauf @EnergieDevlpmt) sont toutes des militants antinucléaires de @sdnfr, @greenpeacefr et ex-Wise.
[37/39]
Les personnes citées (sauf @EnergieDevlpmt) sont toutes des militants antinucléaires de @sdnfr, @greenpeacefr et ex-Wise.
[37/39]
C'est dommage car des sujet porteurs de forts enjeux méritent bien mieux que ça. Cet article ne fait finalement pas mieux que ce que propose Contrepoints sur les énergies renouvelables (et ce n'est pas un compliment).
[38/X]
[38/X]
Pour répondre à l'urgence climatique et tenir un débat constructif sur l'énergie, il va falloir faire beaucoup mieux que ça et laisser de côté ses idées reçues pour se plonger vraiment dans les sujets.
[39/39]
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