#Thread Complotisme

« L’essentiel est que l’analyse du complotisme soit ramenée à son cadre : d’un côté le pathologique, de l’autre le pédagogique. »

Excellent. Implacable. F. Lordon.
Via @mdiplo https://blog.mondediplo.net/paniques-anticomplotistes
Un journaliste de Mediapart :
« Pourquoi nos cerveaux sont-ils si perméables » (à l’aberration complotiste) ?
« Nos » : pas de discrimination offensante.
« Cerveaux » : parce que c’est là-dedans que ça se passe. La réception du complotisme, c’est une affaire « dans le cerveau ».
Un psychologue social, dont la psychologie sociale n’a plus rien de social, saisit aussitôt la perche du « cerveau » : comme une invitation faite aux sciences cognitives et à leur panacée explicative : le biais. Pourquoi le « cerveau » (des complotistes) erre-t-il ?
Parce qu’il est en proie à des biais (cognitifs) — marche aussi avec « pourquoi votre fille est muette » : elle est en proie à des biais (auditifs).

Le complotisme, c’est la pathologie cognitive des pauvres.
La science a ses complexités : quand Macron pense que les « gilets jaunes » sont soutenus par les Russes , il est impossible d’y voir des bouffées complotistes parce qu’il est assez évident que nous avons affaire à quelqu’un qui n’a pas « un faible degré d’éducation ».
Si les malheureux décrypteurs savaient ce que donnerait qu’on décrypte leurs décryptages, ce qu’on porterait au jour — les abysses de raisonnements indigents, idées reçues, servilités intellectuelles inconscientes... fièrement portées en bandoulières comme vérités d’initiés.
En réalité, que la formation des opinions reprenne toute liberté, pour le meilleur et pour le pire, quand l’autorité des paroles institutionnelles est à terre, ça n’a pas grand-chose de surprenant. Mais pourquoi l’autorité des paroles institutionnelles est-elle à terre ?
C’est la question à laquelle les paroles institutionnelles ont le moins envie de répondre. On les comprend : l’examen de conscience promet d’être douloureux, autant s’en dispenser — et maintenir le problème bien circonscrit au cerveau des complotistes.
C’est que l’autorité des paroles institutionnelles n’a pas été effondrée du dehors par quelque choc exogène adverse : elle s’est auto-effondrée, sous le poids de tous ses manquements. À commencer par le mensonge des institutions de pouvoir.
Les institutions de pouvoir mentent. Mediator : Servier ment. Dépakine : Sanofi ment. Bridgestone : Bridgetsone ment. Des dizaines de milliards de CICE pour créer 1 million d’emplois : le Medef ment. Lubrizol : les pouvoirs publics mentent.
Loi de programmation de la recherche : Vidal ment (mais à un point extravagant). Violences policières, alors là, la fête : procureurs, préfecture, IGPN, ministres, président de la République, tout le monde ment avec une obscénité resplendissante. Covid : hors-concours.
Le capitalisme néolibéral a déchaîné les intérêts les plus puissants, or là où les intérêts croissent, la vérité trépasse.

Et il faut accommoder la contradiction entre des politiques publiques forcenées et l’effet qu’elles font aux gens: on arrose généreusement avec du discours.
Au début on fait de la « pédagogie », on « décrypte ». Et puis quand le décryptage ne marche plus, il ne reste plus qu’à mentir — à soutenir que ce qui est n’est pas (« la police républicaine ne se cagoule pas, elle agit à visage découvert »),
Ou que ce qui n’est pas est (on ferme des lits pour améliorer l’accueil des malades). Quand il n’est pas pure et simple répression, le néolibéralisme finissant n’est plus qu’une piscine de mensonge. Nous baignons là-dedans. C’est devenu une habitude, mais on ne s’y habitue pas.
Vient forcément le moment où l’autorité de la parole institutionnelle s’effondre parce que l’écart entre ce qu’elle dit et ce que les gens expérimentent n’est plus soutenable d’aucune manière.
Mais les complotistes voient l’esprit critique de la presse se réarmer dans la journée même de la parution d’un documentaire. Sauf qu’en matière d’esprit critique, ils se souviennent aussitôt des Itw de Léa Salamé, de Macron interrogé par TF1-France2-BFM,
de la soupe habituelle servie à la louche argentée, de la parole gouvernementale outrageusement mensongère (mais jamais reprise comme telle), ils se souviennent de deux mois d’occultation totale des violences policières contre les « gilets jaunes ».
Alors pourquoi les paroles institutionnelles s’effondrent ? Car dans le temps où elles présidaient au délabrement de la société, elles auront, chacune dans leur genre, ou trop menti, ou trop couvert, ou trop laissé passer, ou trop regardé ailleurs, ou trop léché, et ça se paye.
Le complotisme en roue libre, c’est le moment de l’addition. Il faut vraiment être journaliste, ou expert de Conspiracy Watch pour ne pas voir ça. Trente ans de ruine à petit feu de l’autorité institutionnelle, et puis un beau jour, l’immeuble entier qui s’effondre : le discrédit
Beaucoup de médias, qui comptent au nombre des gravats, ne se résolvent pas à regarder le tableau. C’est bien pourquoi il fallait faire aussitôt un hold-up sur Hold-up : pour en fixer la « compréhension », et qu’elle ne s’en aille surtout pas ailleurs.
Idée de génie et redéploiement pédagogique : on va aller leur parler. Mais gentiment cette fois. On va leur écrire des lettres, en leur disant qu’ils sont nos amis — c’est donc la version Libération. Il y a celle du Monde. On va chercher Valérie Igounet de Conspiracy Watch.
On avait l’habitude jusqu’ici de Rudy Reichstadt mais lui est trop épais, c’était l’anticomplotisme première manière, on ne peut plus le sortir. Dans la saison 2, tout est dans l’onctueux, l’humain et la bienveillance. « On est sur un fil », ajoute quand même l’experte.
Tristan Mendès-France explique à peu de choses près qu’on a le stock des zinzins sur les bras et que c’est foutu, il faut faire avec. Mais que tout notre effort doit aller à enrayer les nouveaux recrutements : « il faut viser les primo-arrivants, faire de la prévention ».
Valérie Igounet a déjà commencé : elle mène, nous explique Le Monde, « de nombreux ateliers avec l’Observatoire du complotisme auprès d’enfants » — il faut prendre les « primo-arrivants » de loin.
Qu’on n’aille pas croire à une embardée individuelle: c’est la ligne générale sur à peu près tous les médias, France Culture, Le Monde, Regards... Thomas Huchon, pense également qu’il faut vacciner contre l’épidémie de “fake news”. On se croirait au point presse de Jérôme Salomon
L’article du Monde conclut ainsi :

« la diffusion du complotisme pose un défi à une multitude d’acteurs qui doivent plus que jamais prendre le temps d’expliquer, de démontrer, sans ostraciser ni caricaturer ».

De ne rien comprendre à ce point, c’en est extravagant.
La pensée néolibérale dominante, par ses aspects comptable, cognitiviste et sectaire, est une dérive idéologique dont on peut tous constater au quotidien les conséquences néfastes. https://twitter.com/DocteurGonzo4/status/1336301518530748417
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