Bon, j'ai terminé le film #HoldUp, et quelque chose qui ressort de toutes les notions qu'il mobilise (mal), c'est : tout est trop complexe. Mais pas complexe pour les "petites gens", le bas peuple ou chépakoi : trop complexe pour tout le monde, "élites" comprises.
re- #Thread https://twitter.com/UnMondeRiant/status/1327386132988956674
Aujourd'hui la science est partout : dans nos maisons, dans nos transports, dans nos entreprises, dans nos loisirs, notre santé, notre alimentation, notre politique, etc. On est littéralement entouré de trucs que 99% de la population ne sait pas analyser.
Et quand je dis 99%, je devrais dire 100%, puisque ça inclut aussi les scientifiques de pointe, ingénieurs, décideurs, dirigeants d'entreprises, etc, qui doivent prendre des décisions ou juste, comme nous, utiliser des trucs qui sortent constamment de leurs champs de compétence.
Mon ordi, ma voiture, l'assainissent de mes eaux usées, la production de ma nourriture, mes vaccins, je n'ai que de très très vagues idées de comment ça marche. Et pourtant j'ai fait 3 ans de vidéos à caractère scientifique et je discute avec plein de gens en cursus scientifique.
Je suis obligé de faire confiance aux personnes qui m'expliquent ces choses qui me dépassent, et qui me semblent suffisamment cohérentes entre elles pour que je les accepte telles quelles. Maintenant imaginez quand la confiance s'étiole.
Vous avez eu vent des accidents industriels, des scandales sanitaires, de la pollution, vous savez que des gens meurent de faim alors qu'on aurait assez pour les nourrir, que la police réprime des gens qui ont des revendications, etc.
Ça peut même être vous la victime.
Vous constatez sans peine les inégalités, les discours surplombant des uns, mensongers des autres, contradictoires entre eux, sur des notions dont les résultats semblent nous régir mais qu'on peine à saisir.
Résultats dont vous êtes vous-même peut-être victime.
Eh bien le film se base là-dessus. En insistant sur la perte de confiance, il peut refourguer n'importe quelle explication de n'importe quoi, en expliquant que ce qu'on croyait savoir était faux ou caché. C'est pas compliqué : y'a tellement de zones d'ombre, tellement d'opacité.
Vaccins, 5G, nanoparticules, puces électroniques, bluetooth, bourse, brevets (et d'autres, tous évoqués dans le film) : seuls les gens dans ces parties savent comment ça marche exactement, les autres sont obligés de faire confiance, à plus ou moins haut degré.
Et quand toute cette technicité est utilisée comme discours "rationnel" pour faire passer des lois, donner des directives ou justifier des profits, évidemment que ressentir l'injustice qui en découle provoque le scepticisme. Plutôt la suspicion, même. cf :
Alors nous autres dits de la "communauté de la vulgarisation", on peut bien venir expliquer des notions, montrer des trucs pour "douter avec méthode", expliquer comment X marche ou chépakoi : y'a bien trop. Et ça ne nous donne pas de maitrise décisionnelle pour autant.
Et comme je le disais dans ce thread ( https://twitter.com/UnMondeRiant/status/1251272574719463425), "administrer" du savoir, ça se fait pas juste en donnant de l'info, ça se fait en sachant que le terrain est préparé en amont, voire en le préparant, sinon ça ne sert à rien. Il faut des buts et des disponibilités.
Donc quand les "gardiens du savoir officiel" perdent la confiance des gens qui n'ont pas pour autant les moyens de s'autodéterminer politiquement, vous croyez qu'il se passe quoi ?
Ben il se passe #HoldUp. Les interstices vides, vous les remplissez avec ce que vous voulez.
Alors vous pouvez trouver les complotistes cons, les gilets jaunes cons, les anti-5G cons, les anti-OGM cons, etc, tout ce que ça dit, c'est que vous ne comprenez pas leurs raisons, et que vous ne comprenez pas comment ces situations de défiance se produisent.
Et la situation, elle va pas s'arranger en leur disant "là, cet intervenant dans le film, il dit une connerie". Même si ça arrive 30 fois. Pourquoi ? Parce que la confiance nécessaire à entendre ça, elle est plus là. Elle est déjà envolée, et captée par ce genre de film.
Notre manque de savoir général (vous, moi, tout le monde) il est pas grave parce qu'on fait confiance à nos institutions censées nous représenter et être à notre service : élus, organismes de santé, de contrôle, médias, prescripteurs, etc.
Mais...
Pas de confiance ? Pas d'écoute. Et quand tout vous parait suspect, vous ne faites plus confiance qu'à vous ou aux personnes qui vont dans votre sens. Et ça peut se rétrécir très très vite. Notre manque de méthode quand il s'agit de penser n'intervient pas avant ce moment-là.
Donc on peut bien expliquer mille trucs pour avoir de la "pensée critique" ou du "savoir", on sera jamais en capacité d'égaler ce que provoque un manque de confiance en les institutions au moment d'évaluer une information.
Et comme le dit très bien @PartagerCSympa dans cette vidéo (), le film est manipulatoire à ce niveau-là : il enchaine les banalités au début pour engranger de la confiance laissée vacante, avant de monter dans les tours au fur et à mesure.
On est réellement face à un problème politique : comment reprocher aux gens de manquer d'un savoir qui est de toute façon trop vaste et trop complexe pour être appris par quiconque, alors que ceux qui semblent disposer de ce savoir ont l'air de rouler contre nous ?
C'est insolvable tant qu'on ne reprendra pas la main sur nos outils politiques. Si les décisions venant "d'en haut" et de sphères insondables semblent se servir du savoir pour leur propre intérêt, la réponse est simple : rejet du savoir. Établissement de croyances "alternatives".
C'est la porte ouverte à toutes les personnes se voyant dès lors comme des "lanceurs d'alerte", des "résistants", des "dissidents" alors qu'ils n'en sont pas. Ainsi qu'aux charlatans, d'ailleurs.
Les vrais résistants politiques eux, ils sont court-circuités.
Voilà, c'est ça que je retire du film. Un ensemble de constats dans l'ensemble très évidents, basés sur des observations bien réelles que tout le monde peut faire, mais dont la réponse politique est court-circuitée par une nouvelle couche de mensonge.
Sauf que cette seconde couche de mensonge, elle a pris la place de ce qu'on recherche en terme de justice sociale, de lendemains meilleurs, de combat des inégalités, d'espoir en fait, que nos décideurs n'ont pas su apporter.
Donc tant qu'on n'aura pas de maitrise politique de nos vies et qu'on sera suspendu à des décisions "d'en haut" dont on peine à voir bien les bienfaits, ces discours fuseront. Aujourd'hui en plus, ils ont la technologie pour se répandre comme une trainée de poudre.
Tant qu'on pourra voir à quel point les riches tirent profit de cette pandémie alors que tant de personnes en souffrent, ce sera pas la peine de blâmer les gens qui perdent la confiance en un système qui protège ces riches.
Si tout ce qu'on a comme réponse à apporter aux discours complotistes, c'est "vous manquez de savoir" et "je vais vous expliquer mieux", on mérite vraiment que des charlatans fassent des films pour berner les personnes en attente de changement, de justice et d'égalité.
#Fin
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