Bon ça commence à bien faire cette histoire autour de la statue de #Colbert. Franchement, beaucoup d'hypocrisie encore une fois sur ce sujet de la part des élus de la République (et pas seulement eux). D'abord ces statues sont des moulages (les originaux ont été remisés en 1989)
Ensuite, qu'est-ce que des ministres de l'Ancien Régime viennent faire sur la façade de l'Assemblée nationale ? Pour le dire autrement, pourquoi des figures du pouvoir Exécutif (et pas n'importe lequel) gardent la porte du pouvoir Législatif ? C'est ça la Rép du 49.3 me direz-vs.
Où sont les statues de Mirabeau, de Camus, de Siéyès, de Robespierre, etc. ? Il y en a bien quelques-unes, à l'intérieur du palais. Mais même là, le programme iconographique reste assez déroutant également. Et ce n'est pas @Ugobernalicis qui me contredira sur ce point...
Alors pour comprendre tout ce mélange des genres et cette invisibilisation (relative) des gentils emmerdeurs de juin 1789, il faut revenir un peu sur l'histoire des lieux et sur celle des adresses de l'Assemblée nationale. On y va ! Nom : Assemblée nationale.
Date de naissance :
Date de naissance :
17 juin 1789.
Lieu de naissance : #Versailles.
Comment ? Oui, le premier décor de ce qu'on appelle la démocratie représentative, c'est Versailles. Du moins jusqu'en octobre 1789. Les femmes de Paris ramènent la famille royale dans la capitale et les députés suivent qq jrs après
Lieu de naissance : #Versailles.
Comment ? Oui, le premier décor de ce qu'on appelle la démocratie représentative, c'est Versailles. Du moins jusqu'en octobre 1789. Les femmes de Paris ramènent la famille royale dans la capitale et les députés suivent qq jrs après
L'Assemblée siège provisoirement à l'archevêché mais la salle est trop petite, vétuste (une tribune s'effondre en pleine séance - plus de peur que de mal, c'est pas le drame du Heysel). Novembre 1789 : installation au Manège où les travaux sont vite terminés.
Cette salle n'existe plus. Rayée de la carte par #Napoléon au moment du percement de la rue de Rivoli. Celui-là n'a pas fait que rétablir l' #esclavage, il a aussi fait détruire des lieux de mémoire. Tout ce qu'il reste du Manège c'est une plaque entre deux grilles des Tuileries.
C'est dommage parce que cette salle du Manège c'est quand même le coeur de la vie politique au début de la Révolution française. C'est aussi là que les députés ont jugé et condamné #LouisXVI. Un tenant de l'Exécutif fort comme Napoléon ne pouvait pas conserver un lieu pareil !
Il faut bien comprendre qu'il n'y avait pas que le salle du Manège. C'est tout le pâté de maison qui avait été investi par le pouvoir législatif entre la place Vendôme et les jardins des Tuileries. L'Assemblée nationale avait fait main basse sur deux couvents voisins :
Les couvents des Feuillants et des Capucins. Facile, puisque le 2 nov. 1789 les députés avaient voté la nationalisation des biens du clergé. Les locaux sont évacués au début de l'année 1790 et l'Assemblée peut y installer ses bureaux, ceux de ses comités et les archives.
Une fois la République proclamée et le roi mort, les députés de la désormais Convention nationale s'installent dans une nouvelle salle au palais des Tuileries (où s'installent également une partie des comités - dont le célèbre Comité de Salut Public dans le pavillon de Flore).
Cette salle, c'est l'ancienne salle des machines qui faisait partie du théâtre du palais des Tuileries. Évidemment, toute la déco de ce premier hémicycle reflète la nature du nouveau régime. MAIS la salle disparaît complètement après l'installation de Napoléon aux Tuileries.
Ce n'est donc pas un mais deux lieux de mémoire de la vie parlementaire sous la Révolution que Napoléon a détruit. Sans oublier la destruction de la salle des états généraux à Versailles à partir de 1800 également. Mais pour le coup, Napoléon n'y est, a priori, pour rien.
Cinq ans plus tôt, avec le Directoire, la République se retrouve avec deux chambres législatives. Le Conseil des Anciens reste dans la salle de la Convention aux Tuileries et les petits jeunes du Conseil des Cinq-cents s'installent au palais Bourbon, de l'autre côté du fleuve.
Tout ce qu'il reste du premier #hémicycle du palais Bourbon, c'est le fauteuil du président.
La salle actuelle et une bonne partie de la déco intérieure (en partie réalisée par Delacroix) datent...de la Restauration ! Mais n'allons pas trop vite !
La salle actuelle et une bonne partie de la déco intérieure (en partie réalisée par Delacroix) datent...de la Restauration ! Mais n'allons pas trop vite !
1799 : Napoléon Bonaparte fait son coup d'État. Exit le Directoire, place au Consulat, puis à l'Empire. Le Conseil des Cinq-Cents est remplacé par le Corps Législatif, une véritable chambre d'enregistrement chargée d'approuver les lois sans en débattre. En gros: le 49.3 permanent
Et c'est là qu'arrive #Colbert et les quatre autres ministres de l'Ancien Régime (enfin leurs #statues), Michel de l'Hospital, Sully et d'Aguesseau. Ces quatre statues ornent la colonnade néoclassique (devenue le logo de l' @AssembleeNat) et achevée en 1810.
Pour résumer, nos députés siègent donc dans des décors de la Restauration derrière une façade Empire, (sur)veillés par les ministres des rois de l'Ancien Régime avec, à l'intérieur, quelques références à la Révolution ajoutées au début de la IIIe République.
Peut-on attendre d'un régime qui est à ce point détaché de son héritage révolutionnaire et à ce point figé dans les décors des régimes monarchiques de ce pays d'être capable d'avoir un débat public de qualité sur la statuaire coloniale dans l'espace public ?
À la question "Faut-il déboulonner la statue de #Colbert devant l'Assemblée nationale ?", j'aurais tendance à répondre plutôt ainsi :
"En fait, lui et les trois autres n'ont tout simplement rien à faire là."
Mais veut-on vraiment mettre ce sujet à l'ordre du jour ?
"En fait, lui et les trois autres n'ont tout simplement rien à faire là."
Mais veut-on vraiment mettre ce sujet à l'ordre du jour ?