La @SalamandreNET a subi une vague de commentaires négatifs suite à un article sur l'impact du #chat sur la #biodiversité. Et pourtant... Ce lien existe bel et bien. Petit thread

Le chat domestique (Felis silvestris catus) n'est, contrairement à une opinion populaire, pas originaire d'Europe mais d'Afrique. Son ancêtre serait le Chat sauvage d’Afrique ou Chat ganté (Felis silvestris lybica). Sa domestication commence il y a 8000 ans av. J.-C.
La sélection génétique liée à la domestication a été particulièrement efficace : l'Homme a créé une nouvelle sous-espèce (Felix s. catus) depuis représentée par tout un cortège de races (avis aux éleveurs et amateurs !).
Le chat a la réputation d'être un bon chasseur de souris. C'est sous cette image qu'il nous est parvenu, bien que le moyen-âge il a souffert d'une image négative (sorcellerie, luxure, maléfique et ... la femme. Oui cherchez pas. Le moyen-âge, tout ça).
Sa réputation d'animal de pouvoir est plus tardive, à la Renaissance on commence à lui attribuer un rôle contre les rongeurs. Charles Quint et Richelieu étaient des "hommes à chats". C'est le retour en force du félin en Europe occidentale.
On attribue même un rôle de super-dératiseur aux matous, bien que l'histoire nous donne rapidement tort ! En 1727 lorsque le rat gris se répand en Europe, on se rend compte rapidement que les chiens ratiers sont bien plus efficaces que les chats...
Mais qu'importe, la réputation des chats est faite, et le siècle du romantisme ne va pas manquer de la magnifier... quant à la Marine, elle ne manque pas d'introduire lapins, chats et moutons en masse dans les îles découvertes, sans oublier les passagers clandestins (rongeurs...)
Nous nous retrouvons ainsi au XXIème siècle avec une imagerie faussée du chat : médiocre chasseur de souris, il maintient avant tout son rôle d'animal domestique chéri des Français grâce à l'imagerie culturelle et de l'anthropomorphisme ambiant.
Et nous y voilà. Le chat est un Mammifère Carnivore, qui même très bien nourri ne peut refréner un terrible instinct : l'overkilling. Ou le besoin de prédater tout ce qui se présente sous ses griffes.
Dans les milieux insulaires, les chats introduits n'ont pas manqué de faire un massacre. Au point que de provoquer l'extinction d'au moins 33 espèces endémiques sur les îles du monde entier ! Ce qui le classe dans le top 3 des meilleurs ennemis introduits de la nature...
Le chat domestique forme facilement des populations "autonomes" de l'homme, dites férales. Ce qui le rend invasif dès qu'on lui laisse le champ libre. Or aux USA, il est accusé de détruire 1,3 à 3,7 milliards d'oiseaux et 6,3 à 22,3 milliards de mammifères/an !
Si les ornithologues anglais sont partagés sur l'impact des chats domestiques sur la biodiversité aviaire, au Canada et USA on s'inquiète de ce tableau de chasse qui peut ridiculiser celui des chasseurs !
Bref vous l'aurez compris, si la chasse pose notamment le problème de la pression sur des espèces menacées par exemple, le chat pose un problème d'effectifs de mortalités. Deux problématiques différentes et qu'il ne faut pas chercher à confondre ou comparer à outrance.
Comme toujours, le problème est complexe. A Los Angeles, le chat a aidé à lutter contre les invasions de rats dans les marchés. Ailleurs comme à Chicago, le résultat fut plus mitigé. Comme toujours, l'introduction d'espèces dans un milieu même urbain est un peu une loterie.
Et en France ? Notre pays compte à peu près 14 millions de chats domestiques, dont 6-7 millions de chats errants (comprenez non pucés, donc "dans la nature"). s'ajoutent les chats harets dont on ne connaît pas trop les effectifs (normal, ceux-là se font discrets...).
Selon différentes études, un chat bien nourri peut capturer en moyenne 27 proies / an, contre 273 par chat errant et 1 071 par chat haret ! On sort la calculette, soit en France 189 millions de proies pour chats nourris, 1,9 milliards pour chats errants et quid des chats harets ?
Dans l'absolu, cette pression des chats sur la faune sauvage existe forcément en Europe occidentale son introduction à l'Antiquité, seuls changent les effectifs en augmentation. Mais voilà, ce n'est pas le seul facteur de dégradation de la biodiversité.
S'ajoute des facteurs globaux dont l'impact sur la biodiversité n'est plus à démontrer : artificialisation des sols, destruction des habitats, pollutions, pratiques agricoles, changement climatique, dérangements humains... Et rajoutez la cerise sur le gâteau : le matou en liberté
Enfin, nous avons en Europe un chat autochtone : le Chat forestier (Felis silvestris silvestris) qui peut s'hybrider avec les chats domestiques féraux... Ce risque de pollution génétique est également un risque de déclin du Chat forestier.
En conclusion, le chat domestique fait donc peser une menace sur la faune sauvage. C'est pourquoi il est considéré comme une espèce exotique envahissante dans de nombreux habitats naturels.
Le chat peut donc être considéré comme un fléau écologique, pour citer certains auteurs. Mais à qui la faute ? Pas aux chats, non, mais à l'humain. Pourquoi ? Parce qu'issu de sélection artificielle et introduit par l'homme, Felis silvestris catus n'est pas le responsable direct.
Bien. Nous avons un impact écologique négatif sur la petite biodiversité (oiseaux, mammifères, reptiles...). Comme tous les autres facteurs actuels, il est lié à l'activité humaine. Alors que faire, concrètement, pour réduire l'impact du chat domestique sur la faune sauvage ?
Dans les cas les plus désespérés de dégradation totale d'effectifs d'espèces protégées (ex : oiseaux pélagiques sur écosystèmes insulaires), la capture et la régularisation des chats domestiques est préconisée. Sur le continent, nous n'en sommes pas encore là.
De nombreuses associations (naturalistes, écologistes ou de défense des animaux) réclament tout simplement la stérilisation des chats domestiques. Ainsi, on réduit en partie le risque d'accroître les effectifs de chats errants et féraux.
Solution supplémentaire, faire cohabiter chat et faune sauvage : limiter les divagations de son chat (notez que c'est exigé par le Code Rural !), aménager son jardin, utiliser des collerettes ou clochettes sur colliers sécurisés pour chats qui effarouchent la faune sauvage...
Pour les chats libres ou errants, la capture pour stérilisation est préconisée. Pourquoi pas l'adopter par la suite ? Souvenez-vous, un chat nourri capture 10 fois moins de proies qu'un chat errant !
Je vous présente mon chat : ancien chat errant stérilisé et recueilli. Je suis fier de sauver ainsi des centaines de représentants de la petite faune !
Autre solution, stériliser les chats errants territoriaux et les relâcher ensuite. S'ils continueront d'impacter la faune sauvage, ils défendent leur territoire et empêcheront qu'un couple fertile errant ou haret s'installe à leur place.
Et bien entendu, tout plein d'autres solutions et conseils via les associations comme la LPO : https://www.lpo.fr/les-causes-de-detresse/predation-du-chat-domestique
Enfin, nos connaissances sur le chat et la faune sauvage sont encore trop lacunaires en France. C'est pourquoi le #MNHN la #LPO et la #SFEPM proposent une enquête scientifique participative : https://www.chat-biodiversite.fr/
Fin de ce thread spécial #chats et #biodiversité. Vous l'aurez compris, il existe une multitude de solutions non-destructrices pour limiter l'impact des Matous sur la faune sauvage. Propriétaires de chats, nos animaux ne sont pas coupables, mais nous sommes tous responsables !