[Thread] Une étude est sortie sur l’impact des installations photovoltaïques (PVs) françaises sur les émissions carbone en France et en Europe. Cette étude, réalisée par Artelys et I Care & Consult, a été commandé par France Territoire Solaire : …http://observatoire-energie-photovoltaique.com/images/pdf/fts_icare_artelys_etudeco2_note_mars2020.pdf
Je vous le dis tout de suite, je n’ai pas regardé tous les chiffres à la loupe. Je n’ai pas de raison de croire que Artelys et I Care & Consult se soit trompé dans leurs estimations.
Que dit l'étude ? Le PV évite des émissions de CO2. Mais les détails sont très intéressants.
Que dit l'étude ? Le PV évite des émissions de CO2. Mais les détails sont très intéressants.
[Note] Pour ceux qui le souhaite, le thread a été d'abord rédigé sous forme de PDF.
https://www.scribd.com/document/457004617/Analyse-de-l-impact-climat-de-capacites-additionnelles-solaires-photovoltaiques-en-France-a-horizon-2030
https://www.scribd.com/document/457004617/Analyse-de-l-impact-climat-de-capacites-additionnelles-solaires-photovoltaiques-en-France-a-horizon-2030
L’étude se base sur des simulations qui prennent en compte plusieurs scénarios :
- Hypothèse basse (HB) : on applique l'hypothèse basse de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ce qui représente un peu plus de 42 GW de solaire
- Hypothèse basse (HB) : on applique l'hypothèse basse de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ce qui représente un peu plus de 42 GW de solaire
- Hypothèse haute (HH) : on applique l'hypothèse haute de la programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE) ce qui représente un peu plus de 54 GW de solaire.
Pour ceux qui ne connaissent pas la PPE, voir : https://www.connaissancedesenergies.org/quoi-sert-la-programmation-pluriannuelle-de-lenergie-ppe-170324
Pour ceux qui ne connaissent pas la PPE, voir : https://www.connaissancedesenergies.org/quoi-sert-la-programmation-pluriannuelle-de-lenergie-ppe-170324
Ces simulations sont exécutées sur un pas horaire sur l’année de référence 2030 et prennent en compte la production et la consommation de la France et des pays voisins. En somme, c’est une simulation du réseau européen qui prend en compte l’ensemble des moyens de production et
des moyens d’interconnexion.
Il y a une raison au choix de 2030 est l’horizon du PPE (scénario français), mais c’est aussi un horizon prit en compte par « Sustainable Transition » du TYNDP 2018 de l’ENTSO-E (scénario groupant ceux des pays membres de l’ENTSO-E).
Il y a une raison au choix de 2030 est l’horizon du PPE (scénario français), mais c’est aussi un horizon prit en compte par « Sustainable Transition » du TYNDP 2018 de l’ENTSO-E (scénario groupant ceux des pays membres de l’ENTSO-E).
Les simulations sont effectuées suivant le « merit-order ». Cette notion est très importante pour comprendre pourquoi les capacités sont en concurrence. Il s’agit d’appeler les moyens de production qui ont le plus faible cout à un moment donné (je simplifie).
Pour plus de détail, voir : https://www.connaissancedesenergies.org/electricite-qu-est-ce-que-la-logique-de-merit-order-120215 ou https://twitter.com/Yugnat95/status/1158129120120836096.
Enfin, le calcul des émissions évité est on ne peut plus simple. Il s’agit :
CO2 évité = CO2 direct émis HH — CO2 direct émît HB — CO2 émis PV.
CO2 évité = CO2 direct émis HH — CO2 direct émît HB — CO2 émis PV.
**Resultats**
Avec une augmentation de 12,5 GW de PV qui produiraient 14.2TWh, on pourrait éviter l’émission de 3.83 MtCO2évité/an (ce qui représente 238gCO2evité/kWh).
Avec une augmentation de 12,5 GW de PV qui produiraient 14.2TWh, on pourrait éviter l’émission de 3.83 MtCO2évité/an (ce qui représente 238gCO2evité/kWh).
Comment se répartit cette diminution des émissions de CO2 ? Pour répondre, il faut suivre la répartition des 14,2 TWh supplémentaires produits :
- 6.8TWh vont directement impacter le nucléaire. Il faut comparer à la production prévue alors de 381TWh. Vous me direz que c’est peu
- 6.8TWh vont directement impacter le nucléaire. Il faut comparer à la production prévue alors de 381TWh. Vous me direz que c’est peu
par rapport au nucléaire (~2 %), mais ça représente 48 % de l’énergie produire par ces 12,5 GW de PV supplémentaires qui ne servent pas à décarboner. L’augmentation de la production d’énergie décarbonée en France est de 7,4 TWh.
- 1.1TWh serviront à diminuer le recours à des centrales thermiques fossiles en France. Ici, on économise 0,43 MtCO2 d’émission sur le sol français.
- Enfin, 6,0 TWh partent en export.
En somme, la distribution est la suivante :
- Enfin, 6,0 TWh partent en export.
En somme, la distribution est la suivante :
En Europe, l’augmentation des exports va mécaniquement faire baisser des centrales thermiques fossiles à l’étranger (toujours suivant le merit-order). Sur les 6 TWh exportés :
- 0.3 TWh devrait faire baisser le nucléaire en Europe (pas de gain de CO2)
- 0.3 TWh devrait faire baisser le nucléaire en Europe (pas de gain de CO2)
- 2.2 TWh devrait faire baisser le charbon européen (2,02 MtCO2 évités !)
- 3.3 TWh devrait faire baisser le gaz européen (1,36 MtCO2 évités)
- Auquel, il faut ajouter un tout petit peu de fioul (0,02 MtCO2 évités)
- 3.3 TWh devrait faire baisser le gaz européen (1,36 MtCO2 évités)
- Auquel, il faut ajouter un tout petit peu de fioul (0,02 MtCO2 évités)
Donc au total, l’augmentation du PV en France devrait permettre d’éviter l’émission de 3,40 MtCO2/an de CO2 (270 gCO2Evité/kWh a l’échelle européenne).
Mais tous ces chiffres sont valides si les hypothèses de départ sont respectées. L’étude a pris un scénario supplémentaire. Que se passe-t-il si l’on ne baisse pas la production nucléaire française comme le prévoit le PPE ?
Il y aurait donc en plus des 12,5 GW de PV, 6 GW de nucléaire. Ces 6 GW de nucléaire produisent plus d’énergie. En conséquence, les capacités d’export (les interconnections) sont plus sollicitées au point d’être saturées.
Au lieu d’exporter 6 GWh comme précédemment, on en exporte que 4,5 TWh (1,5 de charbon et 2,3 de gaz) qui permettent d’éviter 2,7 MtCO2/an.
En France, où cette énergie serait coincée, l’impact serait porté principalement sur le nucléaire avec 8,4 TWh de moins et 1 TWh de moins pour les centrales au gaz (0,4 MtCO2Evite/an).
**Résumons**
- Dans le cadre du respect de la PPE, la différence entre les deux hypothèses correspond à un écart de 12 GW (14,2 TWh). Ca permet de réduire les émissions de 3.83MtCO2/an (0,43 en France, 3,4 en Europe). Le solaire effacerait 6,8 TWh de nucléaire en France.
- Dans le cadre du respect de la PPE, la différence entre les deux hypothèses correspond à un écart de 12 GW (14,2 TWh). Ca permet de réduire les émissions de 3.83MtCO2/an (0,43 en France, 3,4 en Europe). Le solaire effacerait 6,8 TWh de nucléaire en France.
- Dans le cas d’une non-réduction de la production du nucléaire en France et toujours avec une augmentation de 12 GW (14.2 TWh) de production solaire, la baisse des émissions de CO2 en Europe serait de 2,71 MtCO2/an (0,4 en France et 2,31 en Europe). Le solaire effacerait 8,4 TWh
**Stockage**
Il y a un autre moyen d’augmenter la quantité de CO2 évité. C’est avec le stockage. je n’en ai pas encore parlé, mais il permet de faire de évoluer les résultats et d’augmenter le CO2 évité.
Il y a un autre moyen d’augmenter la quantité de CO2 évité. C’est avec le stockage. je n’en ai pas encore parlé, mais il permet de faire de évoluer les résultats et d’augmenter le CO2 évité.
Plutôt que d’impacter le nucléaire, avec des moyens de flexibilité (stockage) ont pourrai augmenter de l’ordre de 60 gCO2evité/kWh de PV. Problème : dans l’étude, on ne sait pas quelle puissance doit être installée. Est-ce qu’il s’agit de quelques STEP ?
A priori ce n’est pas suffisant. Ils parlent de stockage hydrogène (qu’on attend toujours). Chose intéressante, c’est que l’étude envisage ce stockage pour un usage permettant l’augmentation de la consommation (mobilité, industrie, bâtiment) ou
pour permettre d’assouplir la maintenance des centrales nucléaires (je sens que ça va en faire tiquer plus d’un).
Les 60 gCO2evité sont bien sûr à mettre en comparaison avec les 238gCO2evité sans stockage. Au total, cela représente dans le meilleur des cas 1 MtCO2Evité/an.
Les 60 gCO2evité sont bien sûr à mettre en comparaison avec les 238gCO2evité sans stockage. Au total, cela représente dans le meilleur des cas 1 MtCO2Evité/an.
**Conclusion**
On paye pour décarbonner les voisins. La PPE à la base est sensée allouer des moyens pour décarboner notre mode de vie. Il est vrai que CO2 ne s’arrête pas à la frontière et que le réchauffement est un problème global. Avec ce mécanisme, on paye pour que les
On paye pour décarbonner les voisins. La PPE à la base est sensée allouer des moyens pour décarboner notre mode de vie. Il est vrai que CO2 ne s’arrête pas à la frontière et que le réchauffement est un problème global. Avec ce mécanisme, on paye pour que les
voisins baissent leurs émissions… Je vous laisse juger la chose, surtout quand on voit comment les voisins ont décidé de se décarboner.
Quand on regarde les derniers appels d’offres pour du solaire en France ( https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/solaire#e9 ), on voit qu’il est à 66 €/MWh.
Quand on regarde les derniers appels d’offres pour du solaire en France ( https://www.ecologique-solidaire.gouv.fr/solaire#e9 ), on voit qu’il est à 66 €/MWh.
Si le même taux est appliqué, alors les 14.2TWh supplémentaires couteraient 937 millions d’euros ce qui représenterait 244 millions d’euros par MtCO2Evite/an. Pour information, la France émettait 324 MtCO2/an sur son territoire en 2016.
Il y a des moyens probablement plus efficaces pour réduire les émissions de CO2 à cout moindre (isolation, renouvelable thermique, transport).
On peut tirer une conclusion intéressante : moins il y a de nucléaire, plus le solaire est efficace pour retirer du CO2 ! Autrement dit, la réduction du nucléaire se fait donc à l’avantage des énergies fossiles et aux dépens du climat. Mais heureusement que le solaire est là
pour compenser un outil qui marche et qu'on met au rebut ! De plus, l'ajout de 12.5 GW ne permet de décarbonner la France, mais décarbonne systématiquement les voisins.
La réduction des emissions de CO2 au niveau européen en jouant sur le mix français est un objectif que je peux comprendre. Seul soucis : le PPE ne permet pas de le faire. Ni par l'installation d'infrastructures (pas assez d'interconnexion et retrait de production bas carbone) ni
par la mise en valeur de ces tonnes de CO2 évité (les français paye deux fois : pour ne pas augmenter leur émissions de CO2 liées au réseau électrique en ajoutant plus de système bas carbone qu'ils en retirent, pour réduire le CO2 chez les voisins parce qu'ils sont généreux).
**Note de fin**
Le prix du PV peut descendre à l'avenir. L'étude imagine ce qu'il se passe si le PV devient rentable et ne demande plus de subvention du CRE. Conclusion ? Le PV pourrait émettre plus de CO2. Dans l'étude il est estimé à 32gCO2/kWh.
Le prix du PV peut descendre à l'avenir. L'étude imagine ce qu'il se passe si le PV devient rentable et ne demande plus de subvention du CRE. Conclusion ? Le PV pourrait émettre plus de CO2. Dans l'étude il est estimé à 32gCO2/kWh.
Apparemment, le lien scridb ne fonctionne pas.
Du coup, retour vers Dropbox https://www.dropbox.com/s/bgly5gu2f8sk1vw/fts_icare_artelys_etudeco2_note_mars2020_Thread.pdf?dl=0
Du coup, retour vers Dropbox https://www.dropbox.com/s/bgly5gu2f8sk1vw/fts_icare_artelys_etudeco2_note_mars2020_Thread.pdf?dl=0
Je rajoute quelques éléments dont je n'ai pas parlé. On m'a posé une question dessus. Du coup voici une précision.
1/ L'étude ne parle que du CO2 émit directement (voir leur ACV). Elle ne prend pas en compte:
1/ L'étude ne parle que du CO2 émit directement (voir leur ACV). Elle ne prend pas en compte:
- le coût (c'est que ce que j'ai essayé de faire en y intégrant un ordre de grandeur)
- les surfaces transformées (12GW on un impacte sur les sol)
- et les émissions indirectes (du fait par exemple du changement d'usage des surfaces).
- les surfaces transformées (12GW on un impacte sur les sol)
- et les émissions indirectes (du fait par exemple du changement d'usage des surfaces).
On m’a fait remarquer une petite erreur (oups 2).
Le cout est plus grand que ce que j’ai estimé (et pas qu’un peu)
Dans les graphiques qui viennent de l’étude, on note le CO2 évité. Mais on ne parle pas du CO2 émis. Ce CO2 est évalué dans l’ACV dans la suite du document.
Le cout est plus grand que ce que j’ai estimé (et pas qu’un peu)
Dans les graphiques qui viennent de l’étude, on note le CO2 évité. Mais on ne parle pas du CO2 émis. Ce CO2 est évalué dans l’ACV dans la suite du document.
L’idée qu’à l’étude, c’est de dire : on évite tant, puis on émet tant. Dans le tableau sur l’ordre de grandeur du cout, j’ai oublié d’intégrer la seconde étape.